Philippe des Pallières : l'interview 2/6

Objets Trouvés

Affiche fête du jeu

Bonjour Philippe, ce soir c’est « l’avant-première » d’Objets Trouvés, la présentation au public de la maison des jeux de Nantes de ta dernière création éditée par Asmodée et disponible depuis quelques jours dans les magasins.
Quelle est la genèse de ce projet ?
Ce jeu est né d’une idée pour un autre jeu, où chaque joueur devrait amener ses propres objets et où tous utiliseraient l’ensemble de ces objets ; ce jeu qui verra peut-être le jour pourrait, du coup, s’appeler « Objets perdus ».
Mais ce projet était latent depuis un long moment : il y a 10 ans j’avais déjà un grand sac où je mettais une quantité d’objets trouvés, chinés dans des brocantes, dans le but d’y jouer.
Et si je remonte 25 ans en arrière, j’avais commencé un mémoire de scénographie aux Arts Déco où je présentais le concept d’un jeu sans règle, mettant un jeu un grand nombre d’objets divers et variés.
Nombre de mes jeux sont nés d’objets, voire de jouets... Ainsi « Armada » n’était au début qu’un bateau en allumettes sur mon bureau.
L’idée d’Objets Trouvés est venue au lancement du site « Objectif Lude », alors que je souhaitais y mettre en valeur des objets de créateurs dont je me sens proche.
Je ne comptais pas faire éditer ce jeu, cela me paraissait improbable… puis, le même jour j’en ai présenté un exemplaire à deux éditeurs : Marc Nunes (d’Asmodée) et Pierre Gaubil (de Days Of Wonder). A ma grande surprise, tous deux m’ont alors dit qu’ils voulaient l’éditer. La préférence est allée à Asmodée tout simplement car c’est chez Marc Nunes que je leur montrais le prototype !
L’actualité d’Objets Trouvés c’est sa sortie en France, et son futur c’est sa sortie en allemand pour le salon de Nuremberg en février prochain : Ravensburger a acheté le jeu et le distribuera en allemand en Allemagne, Autriche et Suisse. C’est Stephan Brück, le directeur de la collection Alea qui suivra le projet.

Peux-tu me dire pourquoi et comment les objets que l’on trouve dans la boîte ont été choisis ?
Au début nous avions eu l’idée de réaliser des petits tirages du jeu avec des ensembles d’objets différents ; ça ne s’est pas fait pour l’instant, ce sera peut-être pour plus tard. L’ensemble présent dans la boîte a été choisi pour son équilibre entre les dimensions, les formes et la symbolique des objets.
N’importe quel objet ne convient pas avec le jeu.
L’ensemble a été défini, affiné, enrichi au fur et à mesure de la rédaction des questions : le travail sur les questions faisait avancer celui sur les objets et réciproquement. Le premier objet est toujours présent : les jambes de femmes. Il s’agit d’un porte-clefs trouvé en brocante que j’avais introduit dès le début. Il s’est cassé, et maintenant il y a deux objets : l’anneau et les jambes ; pour les jambes présentes dans le jeu, un moulage de mon porte-clefs a été réalisé. Au fur et à mesure des tests, j’ai restreint le nombre d’objets longilignes (comme la plume, la brosse à dents) car les joueurs les utilisaient beaucoup pour dessiner des contours.

As-tu pu réellement tout tester ?
« Objets trouvés » est un jeu ouvert, l’ensemble des cas n’est pas « fini » : on ne pouvait donc pas tester de manière absolue l’ensemble des objets : au cours d’une partie, les objets vont contribuer à l’histoire de la partie qui va dépendre du sens que les joueurs attachent aux objets, et cette histoire sera différente à chaque partie ; ainsi si l’un des joueurs utilise la planchette pour faire un lit en début de partie, la planchette risque d’être réutilisée fréquemment pour figurer un meuble.

Comment s’est passé le travail avec l’éditeur ? Pourquoi ne pas l’avoir auto-édité chez « Lui-même » comme certains de tes autres jeux ? Y a-t-il un risque à publier ce jeu ?
Oui, le risque est probable, mais on n’est pas là pour proposer des succès absolus ; même s’il n’y a que 1000 exemplaires vendus, c’est un objet qui va rester, et pour l’instant c’est le plus important. La décision de publication m’a rempli de bonheur ; je ne pouvais pas auto-éditer ce jeu car j’avais besoin d’un œil extérieur, besoin d’une lecture.
Une magie s’est opérée autour de l’équipe qui a travaillé sur ce jeu, tout le monde s’est approprié le projet, que ce soit le graphiste qui a travaillé sur la boîte ou la personne qui est allée chercher aux quatre coins du monde les objets à mettre à l’intérieur. « Objets Trouvés » devait être un travail d’équipe ; les jeux que j’auto-édite avec « Lui-même » sont des projets muris que je maîtrise, dont je connais la forme depuis longtemps.
Il y a eu de nombreuses collaborations pour la rédaction des cartes, des auteurs de jeu : Sylvie Barc, Docteur Mops, Dominique Ehrhard, mon agent Michel Lalet …

Le jeu est vendu 50 Euros … est-ce un handicap ?
Je reconnais que 50 Euros c’est une somme, et que je suis mal placé pour en parler vu que je ne suis pas l’acheteur du jeu.
Maintenant, mon premier jeu il y a 20 ans était vendu l’équivalent de 50 Euros, et le coût de la vie a bien augmenté depuis… enfin s’il avait été vendu moins cher, le jeu aurait été très handicapé par sa réalisation.
J’ai l’impression qu’il y a comme un « mouvement de consommation» qui dicte que le prix d’un jeu doit se situer quelque part entre 15 et 25 Euros.
Cela m’ennuie pour plusieurs raisons :

A suivre : Loups garous et Nouvelle Lune