Faites vos jeux 2007
Interviews du côté des auteurs

Roberto Fraga

Roberto était l'invité d'honneur de cette édition de Faites-vos Jeux. Il est l'un des auteurs français actuels à avoir édité le plus de jeux ; sa ludographie est très variée (du jeu pour enfants chez l'allemand Haba au jeu à deux plus abstrait comme "Eastern Island"), il a la réputation d'être "l'inspecteur Gadget" du jeu de société, utilisant pour ses jeux des accessoires tels que langue de belle-mère ou coussin péteurs. roberto habite à saint-Malo où il exerce la profession de douanier;
roberto
Roberto Fraga (debout à droite) avec des joueurs de son "Squad Seven"

Dans Time is Money ou Xtreme limits, le joueur ne voit pas le chronomètre, dans Squad Seven c’est le CD qui fait sablier, dans Tops on ne sait pas quand le sablier va s’arrêter…la course contre un « temps caché », c’est un mécanisme que tu affectionnes ?
J’aime bien faire des jeux stressants, tu as du t’en rendre compte ! Le premier jeu contre le temps était le premier de la série Squad Seven (qui comprend au moins 10 versions différentes). La première version était faite avec de la musique brésilienne sur une cassette audio.
Pour Tops je n’ai pas cherché particulièrement cette dimension. L’idée du jeu m’est venue par les toupies… mais c’est vrai qu’il faut gérer le temps.
J’ai eu l’idée d’Xtreme Limits en voyant une publicité pour des montres.
C’est vrai que j’ai beaucoup utilisé ce mécanisme : on le retrouve même dans un jeu Haba pour les enfants : Dschungel Schatz.

Le concours de Boulogne est-il toujours une étape indispensable pour qu’un auteur puisse se faire connaître ?
C’est vrai que beaucoup de jeux récompensés sont édités par lasuite… mais je trouve que les éditeurs n’y sont pas assez présents, et qu’ils ne reconnaissent pas assez le travail effectué par la Ludothèque de Boulogne Billancourt ; d’une manière générale, ce prix est peu reconnu en France et le prix du festival de Cannes a un impact bien plus important. En Allemagne, les éditeurs sont bien plus impliqués dans le « Hippodice Autorenpreis » (l’équivalent du Concours de Boulogne) : les directeurs de collection de Schmidt, Ravensburger, … participent aux tests des 10 ou 15 jeux présélectionnés. Et les jeux primés sont systématiquement édités.

Roberto Fraga, l’homme aux jeux rigolos… n’est ce pas réducteur ?
J’ai parfois un peu ce complexe, et j’aimerais bien faire autre chose ! Mes premières créations étaient très simulationnistes, proche des wargames, avec des thèmes de science-fiction. Il fallait gérer des déplacements en 3 dimensions, je faisais appel à des notions de géométrie.
En 2000, lorsque j’ai eu trois prix à Boulogne (battant le record précédent de Bruno Faidutti), c’était pour les Dragons du Mekong, Akhenaton et Moaï (qui allait de venir Easter Island) qui n’étaient pas des jeux loufoques.
Aujourd’hui, même si j’en ai dans les cartons, j’ai du mal à faire aboutir des jeux plus sérieux, car je suis sur trop de projets en même temps. Pour l’instant, suite à des contacts lors des salons, j’ai des maquettes à fabriquer, et comme je suis perfectionniste, ça me prend énormément de temps.
Ensuite, je lance mon site internet (http://www.robertofraga.com) que je dois alimenter : je compte pour chaque jeu retracer son historique, pour bien expliquer le travail réalisé.
Après, j’aimerais bien reprendre des projets comme celui d’un jeu de commerce maritime, un peu sérieux, même si ce n’est pas « Age Of Steam ».

A propos des coussins péteurs... pour les besoins d'un prototype, Roberto voulait se procurer un modèle identique à celui qu'il avait trouvé au Canada. Il a appelé les boutiques de farce et attrapes rennaises leur demandant s'ils avaient des coussins "auto-gonflants" ; certaines lui ont raccroché au nez, croyant au canular téléphonique ou se présentant comme une maison sérieuse.


Florence Fraga

Florence est l'épouse de Roberto.
Florence
Madame Fraga animant un jeu de Roberto

Comment Roberto t’implique-t-il, ainsi que vos enfants dans la création de ces jeux ?
Quand il a une idée, il me la soumet, je lui donne mon avis… Souvent, elle ne me plaît pas, mais il continue sans m’écouter, et c’est tant mieux ! L’idée de la « danse des œufs », ne m’avait pas du tout convaincue… et finalement c’est sans doute le jeu qui marche le mieux !
Lorsque le jeu est à l’étape du prototype nous le testons en famille, avec les enfants d’amis. J’émets des critiques… mais j’ai des difficultés à amener des solutions !
Depuis 6 ou 7 ans que je fréquente les salons, j’essaie d’aider Roberto en donnant ma vision de ce que les éditeurs souhaitent, vision différente de celle du créateur.

Quand tu parles de Roberto à quelqu’un qui ne le connaît pas, tu parles du douanier ou de l’auteur de jeu en premier ?
Aujourd’hui, je parle essentiellement du créateur de jeux. Dans mon entourage proche, j’en parlais déjà il y a quinze ans… et maintenant on sait autour de moi que nous consacrons beaucoup de temps, d’énergie à cette activité, et qu’elle nous fait voyager beaucoup. Les gens sont en général très étonnés, et ne se rendent pas compte de ce que ça peut représenter.
Dans les salons ou festivals comme celui-ci, c’est l’occasion de montrer ce qu’est le travail de création de jeux ; nous partageons nos expériences, en essayant d’aider ceux qui débutent.

Thurn und Taxis, qui a eu le Spiel des Jahres l’an passé est de Andreas Seyfahrt et de sa femme… on pourrait un jour voir ton nom sur une boite ?
Nous y avons déjà pensé et cela pourrait se faire pour un jeu pour enfants pour lequel nous sommes en négociation avec un éditeur…

Mathieu d’Epenoux

Mathieu d'Epenoux dirige Interlude (qui propose des animations ludiques aux entreprises) et édite les jeux "Cocktail Games", jeux à base de cartes vendues dans des boîtes en métal ; avec Odet L'Homer et Roberto Fraga, ils forment la "French Connection", démarchant ensemble les éditeurs dans les salons internationaux.
Mathieu
Mathieu d'Epenoux en pleine discussion

2 jeux sélectionnés, bravo ! Il y a 2 ans tu me montrais ici le prototype de Vitrail, en m’expliquant les difficultés à le fabriquer. Aujourd’hui il est sur les tables du prix du jury…
Vitrail est le jeu dont je suis le plus fier en terme d’édition : l’idée était très innovante, la réalisation était un défi technique très intéressant. Le look est discutable, il était difficile de faire quelque chose dans « l’air du temps » avec jeu. Même si on avait loupé la boîte, il se serait vendu quand même, à partir du moment où la réalisation des cartes était parfaite. L’auteur est  très satisfait de ce qu’on a fait de son jeu. Ca va être une grosse sortie aux Etats-Unis, où il va être publié par GameWright, sous le nom de « Spot On » ou « On the Spot », et distribué pour l’instant à 10000 exemplaires chez Barn & Nobles, l’équivalent de la FNAC.
Cette version sera également en boîte métal, mais avec un format plus grand, adapté au marché américain.

C’est ta 3ème participation, quelles évolutions as-tu remarquées ?
L’ouverture de la scène pour le prix du public lui donne de l’importance, une identité. Cela me fait également très plaisir de voir l’espace qui a été aménagé autour des jeux de Roberto Fraga. La manifestation se pérennise, le public joue de plus en plus... la manifestation est à l’image de Nantes qui est vraiment dynamique en matière de jeu. Elle n’est pas du tout tape-à-l’œil, et c’est bien agréable.
L’organisation du festival est efficace, discrète mais présente.

J’ai cru lire que des jeux pour « joueurs » étaient prévus chez Cocktail Games ?
Nous avons effectivement un jeu dans les tuyaux plutôt différent du reste notre gamme : la partie dure une heure, il faut 15 minutes pour en expliquer la règle. Généralement nos jeux, même s’ils sont « légers » sont plutôt bien reçus des joueurs réguliers, notamment lorsqu’il est signé d’un auteur connu : nous aurons bientôt un jeu de William Attia (auteur de Caylus, jeu de gestion stratégique très apprécié des joueurs passionnés). Ce sera le premier jeu qu’il publiera ailleurs que chez Ystari, et ça me fait particulièrement plaisir.





A suivre : Interviews des organisateurs